Cette étude propose une relecture inédite de la physique élémentaire d’Averroès à partir de trois questions laissées ouvertes par les textes d’Aristote : le statut des qualités premières, l’existence d’une intensité maximale de ces qualités, et la possibilité pour les corps simples d’exister à l’état pur. En croisant les commentaires au De caelo, au De generatione et corruptione et aux Meteorologica, son apport majeur consiste à faire apparaître, dans un corpus souvent lu à travers le seul prisme péripatéticien, l’influence structurante de Galien. En articulant les schèmes hylémorphiques d’Alexandre d’Aphrodise avec la théorie galénique des puissances naturelles, Averroès élabore une théorie du sensible inédite, critique à l’égard d’Avicenne, selon laquelle le cosmos est un système dynamique clos, dans lequel le mélange perpétuel, orchestré par le mouvement céleste, donne lieu à ce que l’on peut appeler une complexion cosmique : non pas un équilibre absolu, mais une somme réglée de complexions relatives, à la mesure de la diversité du sensible.